mardi 27 août 2013

Rahul Gandhi, l'héritier hésitant se prépare


(Paru dans La Presse le samedi 19 janvier 2013. Quelques jours après la publication, Rahul Gandhi devenait vice-président du parti du Congrès, présidé par sa mère Sonia)

(Mumbai, Inde) Son destin est de diriger l'Inde. Après son arrière-grand-père Jawaharlal Nehru, sa grand-mère Indira Gandhi et son père Rajiv, Rahul Gandhi se prépare à devenir premier ministre de la plus grande démocratie du monde. Or, le peu d'engouement que suscite sa candidature à l'extérieur de son parti risque de compliquer sa tâche aux élections de 2014.
Bombay - Son destin est de diriger l'Inde. Après son arrière-grand-père Jawaharlal Nehru, sa grand-mère Indira Gandhi et son père Rajiv, Rahul Gandhi se prépare à devenir premier ministre de la plus grande démocratie du monde. Or, le peu d'engouement que suscite sa candidature à l'extérieur de son parti risque de compliquer sa tâche aux élections de 2014. À 42 ans, Rahul Gandhi n'a peut-être pas de programme politique, mais il a un nom. Et pas n'importe lequel.
Au sein du Congrès, formation historique à l'origine de l'indépendance de l'Inde, être membre de la famille Nehru-Gandhi est amplement suffisant pour se voir offrir les commandes du parti sur un plateau d'argent.
Depuis ses débuts en politique en 2004 à titre de député d'Amethi, fief familial, dans l'État de l'Uttar Pradesh, Rahul Gandhi semble tout faire pour freiner sa propre ascension au pouvoir.
À chaque remaniement ministériel, il refuse un poste dans le cabinet du premier ministre Manmohan Singh, 80 ans, qui ne cesse pourtant de répéter qu'il est prêt à laisser la place aux jeunes.
C'est qu'avant de se voir confier la destinée de 1,2 milliard d'âmes, Rahul veut voyager et découvrir la «deuxième Inde». Celle qu'il n'a pas connue, en vivant sous haute sécurité depuis les assassinats successifs de sa grand-mère Indira en 1984 et de son père Rajiv en 1991.
«Tant qu'un leader n'est pas à même de comprendre ce qu'est la pauvreté [en visitant] la maison d'un pauvre, il ne peut ressentir la colère devant les atrocités commises contre les pauvres», a-t-il expliqué un jour.
«Il a fait des efforts sincères pour comprendre les réalités du pays», estime Aarthi Ramachandran, journaliste et auteure de Decoding Rahul Gandhi. «Mais malheureusement, cela s'arrête à une collecte de données. Il n'a pas été en mesure de les transformer en réel programme.»
En huit ans de politique active, son bilan demeure presque vierge. Tout au plus a-t-il réussi à démocratiser les organisations jeunesse du Congrès. Il ne se prononce que rarement - et toujours prudemment - sur les grands enjeux et son taux d'absentéisme au parlement dépasse les 50%.
Alors que le pays s'entredéchire sur la place des femmes dans la société après le viol collectif d'une étudiante dans un autobus de la capitale le 16 décembre, Rahul Gandhi n'a su qu'offrir ses condoléances à la famille de la victime.
Celui qui se présente comme le «soldat de l'homme ordinaire» dit vouloir inculquer à son parti et dans la société indienne le principe de «méritocratie»... tout en relevant l'ironie que ce combat constitue pour l'héritier de la «première famille» du pays.
En entrevue avec , Milind Deora, ministre d'État des Télécommunications, jure ne pas être au courant des ambitions politiques de son grand ami. «Ce qu'il veut faire et quand il veut le faire, c'est son problème. C'est à lui de décider», explique le député de Mumbai-Sud, 36 ans, lui-même issue d'une importante famille politique proche des Nehru-Gandhi.
La population indienne, pour sa part, n'est pas convaincue. En août dernier, un sondage plaçait Rahul Gandhi deuxième parmi les choix de prochain premier ministre. Loin derrière Narendra Modi, controversé ministre en chef de l'État du Gujarat et l'un des leaders les plus en vue du BJP, parti hindouiste de droite.
Cela n'a pas empêché le Congrès d'annoncer le 10 décembre que Rahul Gandhi, actuellement secrétaire-général du parti, dirigerait sa campagne aux élections générales, prévues au début de 2014. Il remplacera ainsi sa mère Sonia, présidente de la formation, qui avait refusé le poste de première ministre du pays en 2004 après le retour au pouvoir du Congrès.
Une troisième victoire consécutive en 2014 assurerait le poste de premier ministre à Rahul Gandhi. À moins, bien sûr, qu'il ne se désiste.

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