samedi 30 janvier 2010

Ukraine: Le pouvoir orange éconduit au premier tour

Article paru dans La Presse et La Tribune de Genève le 18 janvier 2010.

Kiev, Ukraine - Le favori pour la présidentielle ukrainienne, Viktor Ianoukovitch, s'est facilement qualifié pour le deuxième tour du scrutin hier. Le chef de l'opposition affrontera dans trois semaines la première ministre Ioulia Timochenko. Le résultat du round final s'annonce aussi serré que contesté.

Selon des résultats partiels, Viktor Ianoukovitch, soutenu par Moscou en 2004 et humilié durant la révolution Orange pro-occidentale qui a suivi, a obtenu 37,32 % des suffrages. Ioulia Timochenko recueille 24,40 % des voix, après le dépouillement de 30,03 % des bulletins.

Avec 12 % d'avance sur l'ex-banquier Sergueï Tigipko, son passage au deuxième tour ne fait aucun doute. Cette élection sonne le glas du président actuel Viktor Iouchtchenko, héros déchu de la révolution orange de 2004, qui a récolté moins de 5 % des voix, en cinquième place.

Si les sondages des dernières semaines donne Viktor Ianoukovitch gagnant au deuxième tour, Ioulia Timochenko n'entend pas baisser les bras. Hier soir, la dame de fer de la politique ukrainienne a appelé les " forces démocratiques " à se ranger derrière elle, estimant qu'elles représentent 60 % de l'électorat, pour " emmener l'Ukraine sur la voie de l'Europe civilisée ".

La première ministre de 49 ans faisait ainsi référence à ses anciens alliés de la révolution Orange, qui ont passé les cinq dernières années à s'entredéchirer pour le partage du pouvoir. Elle a promis de " tenir des discussions " avec certains d'entre eux, appelant aussi les électeurs du président Iouchtchenko, avec qui elle est à couteaux tirés, à l'appuyer.

Viktor Ianoukovitch compte lui aussi faire les yeux doux aux perdants et à leurs électeurs. Le russophone de 59 ans, peu charismatique, s'est présenté en rassembleur qui " prendra en considération le point de vue " de ceux qui n'ont pas voté pour lui.

Sergueï Tigipko et Arseni Iatseniouk, respectivement troisième et quatrième ont toutefois appelé pour l'instant leurs électeurs à ne voter pour aucun des deux finalistes.

Sans programme distinctif

Contrairement au duel de 2004 entre le prorusse Ianoukovitch et le pro-occidental Iouchtchenko, les deux candidats du deuxième tour de cette année se différencient plus par leur approche et leur personnalité que par leur programme.

Ianoukovitch se dit aujourd'hui favorable à terme à une intégration de son pays à l'Union européenne, alors que l'ex-orange Timochenko s'est continuellement rapprochée de Moscou au cours des derniers mois, sans délaisser ses liens avec l'Europe.

Si le résultat est serré, le perdant devrait profiter de la fragilité des institutions démocratiques et du système judiciaire du pays pour contester la validité du scrutin, en dénonçant de probables irrégularités. Viktor Ianoukovitch, a indiqué hier qu'il n'avait " pas confiance en le pouvoir actuel ", qu'il soupçonne d'avoir " l'intention de falsifier les résultats de l'élection ".

Ioulia Timochenko croit de son côté que le Parti des régions de son rival, qui détient le pouvoir régional dans l'est et le sud du pays, a tout le loisir d'y bourrer les urnes.

La commission électorale a de son côté écarté la possibilité de fraudes massives qui auraient pu influencer les résultats du scrutin d'hier.

Désabusée par cinq ans de bataille entre les différents clans au pouvoir, une bonne partie de la population ukrainienne a boudé les urnes hier. Le taux de participation n'a pas dépassé 67 %. Au premier tour de la présidentielle de 2004, il avait été de 75 %.

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